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Portes-Flingue...
Par Marc

Mise à jour: 1er novembre 2010
 
 

Pffiou, attention les yeux, c'est digne d'hollywood, tout ça: un gang de motards internautes, un cerveau planqué à Monaco, deux portes -flingues et maintenant une bataille de rond de cuir ?

Phil K. attendait dans la nuit et attaquait sa douzième cigarette.
La rue était sombre comme les espoirs d'un pendu, et des chats filaient en miaulant de rage entre les poubelles, comme des ombres avec le diable aux fesses.
Si l'indicateur avait dit juste, les gros poissons ne devaient pas tarder à sortir de leur aquarium sur la 9eme avenue.
Une sale affaire.


Il n'aurait jamais du quitter son bureau bordélique de la Road Right Avenue.
Mais quand elle est rentrée, blonde aux jambes interminables, que pouvait-il faire, à part un peu de ménage ?
Elle n'était pas seule, une grande asperge l'accompagnait et ca faisait un peu désordre avec son décolleté pigeonnant.
Elle avait un accent étrange, germanique, qui rappelait les plages de Normandie sous la grenaille allemande.
Elle disait avoir eu son adresse par un type du Flying Road Madness, un bar au coin de la Fereck avenue et du Moto Blvd.
Elle se présenta sous le nom de Z.Pat Hie, et le type en habit de clerc de notaire comme le Zéro.
Elle alluma une blonde égyptienne au bout d'un porte-cigarette et accepta le verre de Schnaps que Phil K. lui
présenta.
Le Zéro prit directement une bouteille.

Alors commenca une sombre histoire, entrecoupée de silences pesants comme une balle de 9 mm dans les omoplates.
Elle zonait au FRM les soirs de solitude, en quête d'une épaule réconfortante et semblait lié sans que Phil K. sache vraiment comment au Zéro.
Depuis quelques temps, deux types trainaient leurs guêtres dans l'arrière salle, le genre propre sur eux, dans la pub ou dentistes.
Ils essayaient de se faire une place dans le bistrot, parlaient d'une association bienfaitrice pour les gens de bonne fortune, mais répandaient un malaise que le patron Fast, un ancien qui avait fait Midway sur un Avenger et avait des douleurs dans le dos, ne voyait pas d'un bon oeil.
Phil K.le connaissait bien, et parfois quand il y passait, ils parlaient du bon vieux temps, mais jamais de la guerre.

Quand on l'a faite, on n'en parle pas.

Les deux types en question revinrent un soir, et commencèrent à poser des questions louches aux habitués, répandant une tension comme un cable électrique tendu en travers de la rue.
S'en suivit une mise en garde de Fast discrète, en apparté, mais les deux porte-costume partirent brutalement en hurlant qu'il auraient de leur nouvelles.

Une voiture de police passa au loin, sirènes gémissantes.

Phil K. ecrasa son mégot et ouvrit son carnet.
Des adresses de restaurant, des noms glanés à droite, à gauche.
Une porte s'ouvrit, jetant un faisceau de lumière dans la rue.
Phil K. posa la main sur la crosse de son flingue, mais il vit une gamine sortir en rigolant puis s'éloigner vers les boulevards éclairés.

Vers de meilleurs horizons.

Comme ceux que cette blonde apportait dans le bureau.
Z. Pat Hie répandait une chaleur presque animale autour d'elle.
Elle lui expliquait l'histoire à travers des cils dont nul ne deviat pouvoir se décrocher.
Elle continua, tandis que Le Zéro rajoutait parfois de brefs compléments.
Quelques jours après, les types étaient arrivés torchés comme des scouts les jours de fiesta au bord de la mer.
Ils avaient commencé à insulter tout le monde, avaient fait des propositions indécentes à la blonde et quand le climat tourna à l'orage, ils plaquèrent un jeune, D.O.Loop, qui voulait s'interposer contre le bar d'un geste brusque et avaient entrouvert leurs vestes : une pétoire 8 mm, comme celles du bureau de Sheriff du Comté d'Orange, leur servait de bretelles plombées.
Ils avaient sorti une carte en ricanant, ils prirent le jeune, lui fourrèrent une assignation dans le pantalon et sortirent à reculons.
En haut du papelard gris de l'administration, il était écrit 'Judiciary And Mandatory Assignement New Gouvernemental Attorney'.
Jamanga !

Z. Pat Hie avait pris le papier, l'avait étudié et retranscrit les termes sur un agenda en cuir de serpent qu'elle montrait à Phil K.
Le lendemain, elle avait téléphoné de son bureau, 'Domestic Ingenery Consultances & Son' à des amies de lycée qui travaillaient pour le Comté.
Personne n'avaient entendu parler d'une nouvelle subdivision de l'attorney, mais en ces temps de Mc Carthisme, les bureaux d'investigations fleurissaient plus vite que les arbres dans la forêt de Hollywood.
Zéro, qui s'avéra aussi être le comptable de Domestic bazar, rappela que ce jour là, une cliente très importante les avait accaparé, et elle avait oublié l'affaire des deux types.

C'est plus tard qu'elle se rendit compte qu'elle était suivi.

Une chevrolet 45 bleue, qui était toujours au coin de la rue quand elle se réveillait le matin et qu'elle ouvrait la fenêtre pour que son chat puisse aller se promener sur les toits de L.A.
La même devant "Good Foof & Friend's" à midi quand elle passait prendre rapidement un hamburger à la pause.
Toujours la calandre avachie quand elle prenait le taxi pour rentrer chez elle le soir.
Elle commenca à paniquer un peu, en ces temps de lutte contre les étrangers subversifs, elle avait peur que le FBI s'intéresse à elle comme à son amie Jessy qui travaillait à la Continentale et que l'on avait plus revu depuis sa convocation devant la commission sénatoriale d'enquête des activités anti-américaines.

C'est alors que Zéro, manifestement ému par Z Pat Hie, qui ne le serait devant un 95 D, pris les chose en mains.
Ils connaissait du monde dans la presse, des journalistes véreux, quelques un d'honnêtes mais appeuré par l'idée d'être foché par la commission.
Il fit passer une annonce dans le 'Los Angeles Times', une recherche de perruche appartenant à une grand-mère qui tenait un restaurant, le 'Jamanga', en précisant qu'il s'agissait du nom du bouiboui, pas de la grand-mère !
Et, en même temps, il lanca un ami de régiment - Campagne d'Italie - sur la piste des deux barbouzes.
L'ami, un certain N.O.Fab lui téléphona dans la soirée pour dire qu'il avait quelque chose de solide, mais que Jamanga n'existait pas, il avait vérifié auprès de l'International & National Proctection Institut, l'organisme dans le collimateur de la commision sénatoriale pour établir la liste de toutes les officines de la police dans le monde et aux states en particulier.
Il precisa qu'il rappelerait plus tard, et Zéro attendait toujours de ces nouvelles...

Z Pat Hie reprit le fil de l'histoire, parlant pour le Zéro.

Une 3 eme bouteille de Schnaps sortie du frigo et fut englouti par la gironde germaine.

Le lendemain, le Zéro quitta son appartement de Yahoo Blvd, une de ses horreurs en faux stuc espagnol qui avaient été construit pas loin de l'usine de Lockheed pendant la guerre.
Un homme l'attendait dans l'allée de la résidence.
Le Zéro, alerté par quelque chose de particulier, comme lorsque l'on sent que l'obus de mortier va tomber entre soi et le petit troquet italien où mangent les potes de la section et qu'il faut leur hurler de sortir, le remarque avant de le voir.
Un petit type, un peu rond, les cheveux courts, la cravate trop courte, et le costume froissé des veilleurs de nuit endormis dans leur voiture de ronde, le vit aussi.
Il ouvrit son veston, et alors que le Zéro déferraillé sa pointeuse d'intendance, souvenir d'un officier italien malade d'avoir perdu la tête à coup de Patton, le type lui hurla de se calmer de suite. Il mit ses mains en évidence, bien visibles, et lui annonca qu'il était avocat.
Il voulait parlementer.
Dans sa paluche de droite, un beau papier claquait dans la brise matinale.
Le Zéro lui dit de le poser sur la marjelle de la fontaine assoiffée de la résidence et de faire deux pas en arrière.
L'autre obéit, et Le Zéro s'approcha à pas de loup, comme quand il passait de maison en maison dans les petites ruelles étroites de Naples.
Sans le quitter d'un oeil, il jetta l'autre sur le papier.
Il resta le souffle coupé, malgrès qu'il s'y attendait un peu.
'Mise en demeure pour contrefacon !'. Le temps qu'il relève la tête, le petit gros avait quitté la place !

Phil K. demanda si il avait toujours le papier, mais il était en lieu sur, dans un coffre quelque part entre San Fransisco et Vancouver.

De mémoire, il résuma.

Il avait été sommé de rapporter la mise en demeure auprès du gérant du restaurant 'Jamanga', car celui ci était un nom déposé.
Mais il n'y avait ni adresse, ni contact. Un faux assurément.
La demande était clair : qui était 'jamanga' ?

Phil K. accepta, ils réglèrent les menus détails, faux-frais, une avance de 100 $ et n'obtint pas de rencart avec la blonde.

Phil K. commenca par aller voir B. Patrick, un vendeur de maraichers, vieux rusé qui connaissait tout et et dont les oreilles trainaient régulièrement.
Le vieux étalait des avocats sur la devanture, prenant un malin plaisir à les disposer de façon armonieuse.
P.K. connaissait déjà l'histoire du pauvre B.Patrick, maraicher poussé à la ruine par la crise de 29 et les banquiers avides.
Dans ces temps de folies et de misères, alors qu'il essayait de faire les vendanges et ne récoltait que les raisins de la colère, il avait fait pousser des avocats sur les terres du patron d'un vignoble californien.
Le type l'avait fait détruire à coup de tracteur, puis il avait lui même eu droit à un ravalement de facade à coup de pelle.
Depuis il tenait dans la plus estime les avocats, et racontait aux intimes son histoires les soirs d'été, quand la fraicheur du large venait accompagner les bruits de la porte qui claque au vent.

B. Patrick eu l'air soucieux quand il parla de l'affaire.

Plusieurs personnes parlaient à mi-mots d'un tel organisme bidon.
Il y avait des rumeurs, des histoires pas très cohérentes, on reparlait du Dahlia Noir, d'un comité caché, bref de tout et de rien.
Mais il y avait tout de même une chose qui avait retenu l'attention du vieux marchand de légumes, une histoire d'accident de la route revenait régulièrement, un élément suffisamment inhabituel dans ce genre de ragot pour être retenu.
Une collision fatale pas loin du Flying Road Madness, étouffée dans l'oeuf, des type du LAPD avaient débarqué et agit sur les témoins.
Plus personne ne se souvenait officiellement de la chevrolet qui avait dérapé et écrasé un joueur de Saxo du Midnight Hour Club.
L'attention des gens étaient tournée vers les zazous à l'époque, et la vie d'un noir ne valait pas grand chose de l'autre coté de Central.
Mais quelques éléments avaient filtré : un début d'immat, le fameux nom, une date et c'était tout.

Phil K. le quitta en lui achetant deux avocats, puis passa par les sommiers.

Cela faisait un bail qu'il n'avait pas été les voir, mais un vieux sournois, un vrai rat de bibliothèque assermenté, lui en devait une.
Temoin occulaire dans l'affaire du Dahlia Noir, Phil K. avait réussi à convaincre le capitaine qu'il ne pouvait être mis sur le carreau pour cela, vu que ce soir là il était tellement bourré qu'il n'aurait pas fait la différence entre un éléphant et une asperge.
Le Cramé, il avait tellement cuit au soleil de sa bouse du Kentucky que son crâne était chauve, l'avait plutôt bien accueillit.
Il savait aussi que si Phil K. se déplacait et venait réclamer son dû, c'est que le renseignement lui coûterait.
Phil K. comprit tout de suite qu'il avait touché juste quand il parla de 'Jamanga' : le Cramé commenca à bafouiller, devint nerveux et voulut s'allumer une Camel.

Il lui donna rendez-vous dans un bar, ils seraient mieux pour discuter et il aurait les renseignements.

Phil K. pris donc la 8ème pour faire un saut chez DD.
DD était un cas que Phil K. aimait par dessus tout.
Un vieux shnock jovial, un peu travello à ses heures, qui de temps à autre se faisait alpaguer par les flics du quartier parce qu'il se baladait en collants sur une chaise roulante dans la rue.
Il était mécano de métier, mais il passait plus de temps à démonter et remonter ses Indians qu'à rouler dessus.
On raconte que dans le temps, il faisait des courses sauvages sur Mulholland Drive la nuit, mais les Hell's, anciens bombardiers qui n'avaient pas réussi à décrocher, régnaient en maitre sur les lieux.

D.D. était toujours aussi vieux, aussi con et aussi jovial.

Il parlait de tout et de rien, des flat allemands qu'il espérait voir venir d'Europe, des sorties et de soirées déchainées au Sweety Club sur la 12ème.
C'est là que Phil K. l'avait connu, fraichement libéré, 30 $ en poche, une médaille et pas un seul endroit pour pieuter.
D.D. l'avait accueillit sans problème, et l'avait hébergé deux semaines durant où il refusa de se faire payer quoi que ce soit.
La seule chose qu'il espérait était de bonnes déconnades.

Phil K. lui parla à mots couverts de l'affaire. D.D. s'inquiéta un peu, réfléchit longuement, puis lui parla de la chasse au signe.
Phil K. était habitué aux disgressions du vieux, mais il savait écouter le message niché entre les conneries.
Car il y en avait un.

Les singes, on les attrape avec une pomme et un vase.
L'ouverture du vase est juste du diamètre de la pomme.
On met la pomme dans le vase et on le dépose dans la forêt.
Le singe, animal craintif mais cupide, ne peut s'empécher de sentir la pomme et d'essayer de la prendre.
Seulement c'est une bestiole autant stupide qu'avide, car il ne peut pas ressortir le fruit du récipient, sa main bloquant à l'encolure mais refuse de la lacher quand le chasseur arrive.

Phil K. avait compris.
Les deux hommes se montreraient si il arrivait à leur voir un vase avec une pomme.
Il pensa à Patrick B. pour avoir le végétal et sourit.
Sacré vieux D.D., derrière sa face de branquignole, il y avait toujours de bonnes idées.

L'heure vint où le Cramé devait passer.

Phil K. se rendit sur les lieux en retard, un accident avait bloqué tout Sunset.
Le Cramé n'était pas là.

Mauvais signe.

Phil K. observa la salle.
Des étudiantes de l'université, en petit pull, jupe et soquettes blanches pouffaient de rire.
Des employés en tout genre mangeaient sans un bruit en écoutant les infos à la radio.
P.K. prit place dans jun box et commanda un hamburger Corned-Beef.
3/4 d'heure de retard, ca ne lui ressemblait pas.
Il vint voir la serveuse, une petite méxicaine pale.
Il demanda si un homme, petit, chauve et moche était passé vers midi.
La méxicaine le regarda comme si il était le diable en personne, ce qui n'était bien sur pas vrai, il avait arrêter de jouer au dur depuis longtemps.
Elle lui dit dans un flot moitié anglais-moitié espagnol que peut être que quelqu'un était venu, mais elle n'en savait pas plus.
P.K. comprit qu'elle ne parlait pas à cause du patron qui les regardait du haut de sa caisse enregistreuse d'un mauvais oeil.
P.K dit alors à haute voix 'et apportez moi donc un café et une part de cette merveilleuse part de tarte aux pommes !', et fit demi-tour.

A mi chemin, il lui dit 'et le LA Times si vous l'avez ?'.

Il se rassit.

La serveuse vint au bout de quelques minutes.

Elle mit un temps exagérement long à le servir, et glissa entre ces dents ' Qui êtes vous ? Ne mentez pas !'
Il répondit, peu surpris, car il avait visé juste.
'Dans le journal' puis conclut sur une expression espagnole méprisante.
P.K. compris à rebours :'Salaud de flics blancs !'

Il ouvrit négligement le journal et trouva une enveloppe du LAPD dedans, qu'il ouvrit en essayant de se planquer au maximum derrière le canard.
'Ramon Joures, 1236 Luck Street, Mess Cilores, ARIZONA.
Etouffé par les services généraux. Décision venant du plus haut.
Accident non mortel, mais victime disparue. Suspecté de conduire doppée.

Affaire brulante.

Laisse tomber, c'est trop gros pour toi.
A détruire !!'

P.K. mémorisa lentement le message, se leva et alla aux toilettes.

Il lava conscieusement le papier, l'imbiba d'eau au point où l'encre se transforma en en soupe noire ocre, le roula et l'essora, puis le déchira en petit morceau qu'il fit couler en partie dans l'évier, en partie dans la lunette des chiottes.

Ca se présentait mal !!!



8:0) cram TeXeD